Bill Tchato, bonsoir et merci de nous accueillir dans votre bureau
Bonsoir
Si nous sommes là, c’est pour parler de l’affaire des primes des Lions U20. Depuis leur retour de la CAN en Mauritanie où ils ont atteint les quarts de finale, ils sont dans l’attente. Qu’est-ce qui fait problème ? Pourquoi les primes de ces lions juniors ne sont pas payées ?
Disons que quelle que soit la catégorie, que ce soit les U 20 ou une autre sélection, c’est toujours un budget qui est fait pour une compétition par la Fédération. Elle établit les primes qui sont payées par l’Etat. En ce qui concerne les U20, moi, en tant que coordonnateur général, avant d’arriver ici, j’avais dit aux enfants qui ne s’étaient jamais plaint de primes – ça, c’est même à les féliciter puisqu’ils n’ont pensé qu’à la compétition – qu’à leur retour, ils auront leurs primes. Il faut savoir qu’il y a beaucoup de personnes quand même qui signent un budget quand il est fait : le Président de la Fédération, le Ministre des Sports et aussi aux Finances. C’est des personnes vraiment importantes. Les enfants et peut-être même les familles ont peur que leurs primes ne soient pas payées. Mais avec autant de personnalités qui signent des papiers, cet argent, déjà, ne peut pas être détourné, ne peut pas aller ailleurs. Ensuite, je leur avais dit qu’à leur retour, j’espérais qu’on allait tout faire pour que les primes soient disponibles mais les primes ne sont pas disponibles. Donc, l’agent comptable qui reçoit les fonds des Finances n’a pas encore reçu ces sommes là pour pouvoir les payer. Quand on est arrivés ici à Yaoundé, je les ai réunis pour leur dire que l’argent n’était pas encore disponible, de rentrer tranquillement chez eux et que dès que ce sera disponible, on va leur faire signe. Je pense que ce sont même peut-être les familles qui attendent. On comprend que les familles attendent des enfants qu’ils reviennent avec quelque chose parce qu’ils sont partis. Mais surtout, il faut savoir que les enfants n’ont pas à s’inquiéter, c’est leur argent, c’est pour eux parce qu’ils ont quand même gagné des matches là-bas, ils ont eu des primes de participation. Quand l’Etat a dit quelque chose, l’Etat a toujours rempli sa mission. Après, vous connaissez l’administration ici, c’est parfois un peu lent et tout, donc, ils vont attendre, tout simplement.
En tant que coordonnateur, vous êtes forcément à la manœuvre pour que ces primes-là soient payées. Est-ce que vous pouvez les rassurer que le paiement, c’est pour bientôt ?
Je peux les rassurer là encore maintenant. Je les ai déjà rassurés en étant en Mauritanie, en arrivant ici avant qu’ils ne retrouvent leurs familles. Je leur ai dit : « faites-moi confiance, ces primes vont être payées ». Seulement, on va attendre qu’il y ait de la disponibilité, tout simplement. Dès que l’argent va être disponible, qu’il sera remis, pas directement à moi mais à l’agent comptable, je fais les états des personnes qui ont participé et les primes vont être réglées d’ici peu.
Est-ce que vous êtes d’avis comme beaucoup d’autres que le paiement de ces primes a quand même trainé, que ces primes auraient dû être payées avant qu’ils ne quittent la Mauritanie ?
Vous savez, il y a les primes de présence qui reviennent à tous ceux qui partent à la compétition. C’est toujours bien de payer ces primes là avant. Il faut savoir quand même qu’avec la CAF, celle qui décide des compétitions, avec la situation actuelle, ce n’est pas évident d’être souvent au même rythme parce que des fois, les compétitions sont annulées, des fois, elles sont en retard. Je vous prends l’exemple des U17 dont la compétition vient d’être annulée. Les U17 ont été qualifiés sans avoir participé au tournoi de l’UNIFFAC. Et tout de suite, la CAF nous a dit : « écoutez, vous êtes directement qualifiés » alors qu’on aurait dû d’abord faire l’UNIFFAC. Nous, on s’est empressés de vite faire un budget avec toutes les primes de stage rapidement. Et vous savez que le budget doit être étudié, il doit être validé, il y a tout un processus qui fait qu’aujourd’hui, souvent avec les compétitions qui sont annulées, on ne sait pas très bien si ça va se faire, où ça va se faire surtout parce que même l’UNIFFAC, on ne savait pas où ça allait se faire. C’est toutes ces choses qui font à ce qu’à la fin, il y a un petit retard. Mais l’essentiel, c’est que ce sera payé, ça c’est surtout ce que les enfants doivent mettre dans leurs têtes, ne pas penser qu’on doit les oublier.
Il y a une mauvaise langue au niveau des réseaux sociaux qui estime que le retard est dû forcément au fait qu’au niveau du Ministère des Finances, on ne croit pas beaucoup à la légitimité des dirigeants actuels de la FECAFOOT pour débloquer cet argent. Que répondez-vous à ces affirmations ?
Pas du tout ! L’Etat et la FECAFOOT travaillent depuis bien longtemps ensemble et jusqu’à présent, les primes ont toujours été payées. Ce n’est pas parce qu’il y a un retard que c’est fait exprès. Je pense que c’est vrai, il y a le football mais aujourd’hui, nous sommes dans une situation sanitaire mondiale où le football, pour moi, ne passe pas avant. Il y a beaucoup d’autres situations, il y a beaucoup de malades, beaucoup de personnes à soigner et si l’Etat décide qu’on doit d’abord mettre à la disposition de ceux qui sont malades, le nécessaire avant le foot, moi, je suis totalement d’accord avec l’Etat. Maintenant, il faut que ces enfants-là qui sont jeunes, apprennent à patienter, à ce dire que ce n’est pas de l’argent perdu, c’est de l’argent qui va leur être donné. Je dis, ce sont même les parents en fait qui leur demandent, qui parfois, poussent leurs enfants à ce que ça sorte sur les réseaux sociaux alors qu’aujourd’hui, nous on ne peut pas pointer du doigt l’Etat. Non, sans l’Etat, la fédération serait quand même mal parce qu’il nous aide beaucoup. Donc, ça va prendre le temps que ça va prendre et puis je pense que l’Etat va faire son boulot comme il le fait habituellement.
De tels retards, ça n’arrive pas tout le temps, c’est vrai mais ne pensez-vous pas aussi qu’ils sont de nature à démoraliser les binationaux qui ont choisi d’évoluer avec le Cameroun, alors qu’ils avaient la possibilité de choisir d’autres nations ? Est-ce qu’ils ne verront pas ça comme un petit manque de sérieux ?
Non, je ne pense pas parce que les binationaux, quand ils jouent avec la France par exemple, ils ne demandent pas les primes, ils ne demandent pas tout ça, ils jouent d’abord et ce n’est pas parce que c’est le Cameroun qu’on va dire : Non, il faut d’abord l’argent, il faut que les primes soient payées. Non, je ne pense pas qu’on les éduque de cette manière-là. Ça n’a rien à voir, les gens ne viennent pas pour se dire : combien on va être payés. C’est d’abord leurs performances individuelles qui font à ce qu’ils puissent être vus plus tard. Je pense que ça n’a rien à voir avec l’argent, c’est d’abord la performance, c’est d’abord penser à gagner, d’abord l’amour du pays, l’amour du maillot avant de se dire qu’il y a les primes. C’est sûr que quand on dit que vous aurez les primes et tout ça, d’accord, il faut assurer, il faut le faire. Mais ça doit être fait, c’est juste qu’il y a un petit délai à attendre. C’est vrai que d’habitude, il n’y a pas vraiment de délai mais aujourd’hui, il n’y a pas que le football, il y a beaucoup d’autres choses qui sont plus importantes que le football. Donc, on va attendre.
On va en profiter pour vous amener à dire un mot sur l’annulation de la CAN U17. Comment avez-vous accueilli cette nouvelle ?
J’ai été très déçu parce que quand on se prépare quand même pendant un bon moment, il y a beaucoup d’investissements, de la fédé, de l’Etat : investissement des joueurs qui restent en stage, qui ne vont même plus à l’école parce que c’est quand même des mineurs encore qui s’investissent et qu’à cinq jours du début, on apprend que tout est foutu en l’air. On espère que cette CAN va être reportée dans quelques mois parce que si elle est complètement annulée, ça voudra dire que voilà une génération qui ne fera pas de CAN et qu’il faudra prendre d’autres jeunes qui auront encore l’âge éligible pour pouvoir faire cette CAN. C’est une très grosse déception, surtout pour les enfants.
C’est dire que les conséquences sont énormes…
Les conséquences sont énormes parce que c’est des conséquences financières. Imaginez-vous que nous, on devait partir au départ le 4 mars, on a attendu le visa et c’est à cinq minutes qu’on nous a dit qu’on n’avait pas reçu de visa. Il a fallu annuler les billets, on a remis ça pour le prochain voyage qui était le 8 et là encore, on a attendu les visas et finalement, on ne les a pas eus. Donc, l’agence qui a déjà émis les billets est en train de faire payer les pénalités et du coup, c’est des grosses pertes financières. Pour les stages qui ont été faits, il faut payer les hôtels et tout ça, ce n’est pas gratuit.
La CAF a-t-il au moins pensé à dédommager les équipes par rapport à tout cela ?
Nous allons quand même soumettre à la CAF les taxes qu’il y a eues et puis, on va voir ce qu’ils vont faire pour voir s’ils peuvent quand même nous aider à récupérer quelque chose.
Pour terminer cet entretien, est-ce que vous pouvez dire un mot sur Enzo Tchato et ses prestations durant la CAN ?
Ah, mon fils ! Rire… Ecoutez, moi personnellement, en tant que père, c’est une fierté. Je ne suis pas du tout étonné de sa performance. Beaucoup de personnes ont pensé que comme c’était le fils du coordonnateur, on l’a mis là comme ça, c’est comme s’il est tombé du ciel. Il faut savoir qu’Enzo quand même, sa première licence avec Montpellier date de 2007. Il a commencé depuis 2007 à Montpellier, il a gravi tous les catégories. Si aujourd’hui, Montpellier lui fait des contrats – il est déjà à sa quatrième année de contrat, il s’entraine avec la réserve pro, à 18 ans, il a été surclassé plusieurs fois- ce n’est que normal. Moi, si je suis un coach et que je vois un gamin comme ça, je ne peux que l’appeler avec les U20. Aujourd’hui, pour moi, je ne suis pas surpris, les autres qui ne le connaissaient pas le découvrent. Le responsable du centre de formation de Montpellier est très satisfait de lui, il est à deux doigts de signer professionnel. Donc, il est vraiment sur la bonne voie, il faut qu’il continue à travailler.
Dans une interview récemment accordée à FECAFOOT TV, il a notamment magnifié le rôle que vous jouez auprès de lui en tant que père et ancien footballeur. C’est dire que vous lui accordez un suivi particulier.
Oui, bien sûr ! J’ai la chance que je peux regarder ses matches sur des applications. Après chaque match, je visionne et il me demande ce qui n’a pas été. Je lui donne de petits conseils, c’est tout à fait naturel et puis, ça lui permet de corriger et de continuer à travailler.
Merci beaucoup Bill Tchato
C’est moi qui vous remercie.
Entretien mené par Wiliam Tchango et Léger Tientcheu